XV

Un soir, il rentrait pour un appel de retraite. Le vieux quartier n’avait plus son aspect d’accablement habituel. – Dans la cour, des groupes causaient bruyamment ; il y avait des spahis qui montaient ou descendaient les escaliers quatre à quatre, – comme sous l’influence d’une joie folle. On devinait du nouveau dans l’air.

– Grande nouvelle pour toi, Peyral ! lui cria Muller l’Alsacien, – tu pars demain, – tu pars pour Alger, heureux garçon que tu es !

Douze spahis nouveaux étaient arrivés de France par le bateau de Dakar ; douze des plus anciens allaient partir – (et Jean était du nombre) – pour aller par faveur finir en Algérie leur temps de service.

On partait le lendemain soir pour Dakar.

A Dakar, on prendrait le paquebot de France, à destination de Bordeaux ; de là, on rejoindrait Marseille par les lignes du Midi, – avec des délais de route, permettant de circuler, de faire une apparition au pays, – pour ceux qui avaient un pays et un foyer ; – puis à Marseille on prendrait le paquebot d’Alger, – ville de cocagne pour les spahis, – et les dernières années de service passeraient comme un rêve !