Guignard passe ensuite à la Chaldée, à Babylone et l’Égypte. Il traite en détail des obélisques, des pyramides et du puits de Syène, qui est sans ombre à midi. Il oppose Sanchoniaton à Bérose, et conteste le voyage d’Hannon autour de l’Afrique. Il fixe en passant la position d’Ophir, d’où les vaisseaux de Salomon rapportaient de l’or, et donne son opinion particulière sur la chronologie de Newton, en ce qui concerne la dynastie des rois d’Égypte, ce qui le conduit à fixer avec précision la nature et la position du nilomètre. Après quoi il boit de l’eau sucrée ; quelques savants ouvrent un œil, trente-six changent de position sans se réveiller, deux l’écoutent attentivement et prennent des notes.
Guignard revient ensuite en arrière pour remonter aux Phéniciens et à leurs colonies, et fait en passant l’histoire des peuples pasteurs, ces peuples estimables qui regardent les astres au lieu de garder leurs moutons. Il fait une excursion à la Chine, revient au zodiaque de Dendirah, lit une note accessoire sur la statue de Memnon, passe à la Grèce, à Rome, et suit pas à pas les astronomes d’Alexandrie sous les Lagides. Alors il déroule tout le système de Ptolémée, il conteste l’authenticité de la phrase où Cicéron pressent le système de Copernic ; puis, revenant aux Olympiades, il passe de là au cycle de Méton, et termine son exposition par un résumé général de la connaissance des temps chez les peuples de la race pélasgienne. Après quoi, il boit un verre d’eau sucrée, et rajuste ses manchettes. Deux savants prennent des notes, cinquante-un ronflent en faux-bourdon, quatre rêvent un cheval marin qui déambule dans un gyre spiral.
Guignard dépeint en détail l’invasion des Barbares, et s’attache à porter la lumière dans les ténèbres du moyen âge. Il cite Charlemagne et Théodoric, consacre douze pages à Ticho-Brahé, et, avant d’arriver à Copernic, il récapitule sommairement le tableau qu’il vient de tracer. Puis il fait une énumération éloquente des travaux de ce grand homme, passe à Kepler, à Newton, et arrive au sextant de Bradley. Après quoi, il boit un verre d’eau sucrée, et s’assied quelques instants pour s’essuyer le front. Deux savants qui ne dorment que d’un œil prennent des notes avec l’autre ; cinquante-cinq rêvent des points et virgules qui processionnent sur du papier blanc.
Alors Guignard passe en revue le Zodiaque tout entier ; puis, arrivé au Capricorne, il annonce l’apparition d’une comète opaque qu’il place à cinq milliards de lieues de la terre, et dont la révolution solaire est de deux cent soixante et dix-huit ans, vingt jours, trois minutes, deux secondes et une tierce.
Tous les savants se réveillent en sursaut, et demandent l’impression, qui est votée à une majorité de cinquante-cinq voix contre deux. Ce sont celles des deux savants qui ont pris des notes, Lunard et Nébulard. La séance est levée, et Guignard reçoit d’unanimes félicitations.