IV

Il est temps de retourner à Milord, que nous avons laissé en chemise vers les rives du grand canal, faisant une battue pour retrouver l’habit du Maire, dont le docteur Festus se trouvait vêtu à son préjudice.

En faisant sa battue, Milord, en chemise, était arrivé à l’endroit où restait gisant Pierre Lantara le vagabond, tué récemment par Jean Baune. Croyant que c’était un brave paysan qui sommeillait, il lui avait dit d’une voix forte : Do you speak english ? À quoi Pierre Lantara ne répondit rien. Milord s’étant alors approché, reconnut parfaitement un des deux brigands qui l’avaient dévalisé. Sur quoi il entra en humour, et fit, en bon anglais, quatre-vingt-deux plaisanteries diverses sur cette idée très-simple que le drôle avait attrapé ce qu’il méritait, riant si prodigieusement entre chacune d’elles, qu’il se creva la peau du diaphragme ; d’où sa voix devint creuse, et son rire abdominal.

Du reste, pour ne pas rester en chemise, Milord se vêtit des habits de Pierre Lantara, et put reprendre sa route vers l’hôtellerie, où Milady devait l’attendre. Mais à sa grande stupeur, il ne trouva dans la commune, dans le village, dans l’hôtellerie, pas une âme vivante, si ce n’est l’âne de Julien le borgne, qui léchait la boîte à sel. Milord l’enfourcha, et repartit, aussitôt, extrêmement inquiet du sort de son épouse.