7 – Le léopard et l’écureuil

 

Un écureuil sautant, gambadant sur un chêne,

Manqua sa branche, et vint, par un triste hasard,

Tomber sur un vieux léopard

Qui faisait sa méridienne.

Vous jugez s’il eut peur ! En sursaut s’éveillant,

L’animal irrité se dresse ;

Et l’écureuil s’agenouillant

Tremble et se fait petit aux pieds de son altesse.

Après l’avoir considéré,

Le léopard lui dit : je te donne la vie,

Mais à condition que de toi je saurai

Pourquoi cette gaîté, ce bonheur que j’envie,

Embellissent tes jours, ne te quittent jamais,

Tandis que moi, roi des forêts,

Je suis si triste et je m’ennuie.

Sire, lui répond l’écureuil,

Je dois à votre bon accueil

La vérité : mais, pour la dire,

Sur cet arbre un peu haut je voudrais être assis.

– Soit, j’y consens, monte. – j’y suis.

À présent je peux vous instruire.

Mon grand secret pour être heureux,

C’est de vivre dans l’innocence ;

L’ignorance du mal fait toute ma science ;

Mon cœur est toujours pur, cela rend bien joyeux.

Vous ne connaissez pas la volupté suprême

De dormir sans remords : vous mangez les chevreuils,

Tandis que je partage à tous les écureuils

Mes feuilles et mes fruits ; vous haïssez, et j’aime :

Tout est dans ces deux mots. Soyez bien convaincu

De cette vérité que je tiens de mon père :

Lorsque notre bonheur nous vient de la vertu,

La gaîté vient bientôt de notre caractère.