13 – La pie et la colombe

 

Une colombe avait son nid

Tout auprès du nid d’une pie.

Cela s’appelle voir mauvaise compagnie,

D’accord ; mais de ce point pour l’heure il ne s’agit.

Au logis de la tourterelle

Ce n’était qu’amour et bonheur ;

Dans l’autre nid toujours querelle,

Œufs cassés, tapage et rumeur.

Lorsque par son époux la pie était battue,

Chez sa voisine elle venait,

Là jasait, criait, se plaignait,

Et faisait la longue revue

Des défauts de son cher époux :

Il est fier, exigeant, dur, emporté, jaloux ;

De plus, je sais fort bien qu’il va voir des corneilles ;

Et cent autres choses pareilles

Qu’elle disait dans son courroux.

Mais vous, répond la tourterelle,

Êtes-vous sans défauts ? Non, j’en ai, lui dit-elle ;

Je vous le confie entre nous :

En conduite, en propos, je suis assez légère,

Coquette comme on l’est, par fois un peu colère,

Et me plaisant souvent à le faire enrager :

Mais qu’est-ce que cela ? – c’est beaucoup trop, ma chère :

Commencez par vous corriger ;

Votre humeur peut l’aigrir… qu’appelez-vous, ma mie ?

Interrompt aussitôt la pie :

Moi de l’humeur ! Comment ! Je vous conte mes maux,

Et vous m’injuriez ! Je vous trouve plaisante :

Adieu, petite impertinente ;

Mêlez-vous de vos tourtereaux.

Nous convenons de nos défauts ;

Mais c’est pour que l’on nous démente.